Les années 1990 et 2000 ont vu une société en prise avec une certaine déformalisation des relations, particulièrement des relations professionnelles. Une tendance venue des États-Unis, où le « you » ne distingue pas les deuxièmes personnes du singulier et du pluriel.
Aujourd’hui, on observe un retour aux valeurs dites, fondamentales : la politesse, l’habit distingué… le vouvoiement est donc remis à l’honneur.

Le « vous » impose une distance forcée et une marque de respect, alors que le « tu » va symboliser la proximité et une certaine « coolitude ».
Pour le jeune embauché ou jeune stagiaire, c’est un point important d’apprentissage de la culture d’entreprise. C’est une faute de goût déplacée que de dire « tu » à son N+1 sans y avoir été invité… et cela va être une marque de respect, une entrée dans le cercle des initiés lorsque votre N+2 vous invitera à le tutoyer…

Ed Paschke_ Dubois_1978_ Musée national d'art moderne_ Paris

Ed Paschke, Dubois, 1978, Musée national d'art moderne, Paris

Le « tu » et le « vous » en pratique
Ce sont la proximité et l’intimité qui vont définir l’emploi du tutoiement ou du vouvoiement.
On se tutoiera entre membres d’un même service, entre voisins de bureaux ou personnes d’une même catégorie d’âge.
Avec le « vous », on indique une forme de distanciation, indispensable dans les rapports hiérarchiques.
Vouvoyez systématiquement votre supérieur hiérarchique, sauf si ce dernier vous invite à le tutoyer. Un bon compromis, en cas d’hésitation (par exemple, si une personne est plus âgée que vous, mais au même poste…) est d’appeler quelqu’un par son prénom, tout en le vouvoyant. On marque le rapprochement et le respect.
Dans le cas où vous seriez manager, le vouvoiement est une base élémentaire.
Michel B., chef d’équipe chez Vinci, témoigne : « Je vouvoie systématiquement mes agents d’équipe, qu’ils soient ingénieurs ou mécaniciens, même si eux me tutoient. Çà me permet de toujours garder une distance nécessaire. Nous ne sommes pas « potes ». Je suis leur manager, et en cas de conflit, je peux mieux assumer mon rôle. Çà permet de ne pas passer à quelque chose de personnel, on reste sur le terrain pro ».

Pourquoi adopter le vouvoiement ?
Pour la distance rassurante qu’il procure, pour le respect qu’il induit, et car il reste en-dehors de la sphère affective, qui pourrait devenir problématique.
Il est également d’un usage systématique avec certains interlocuteurs : son fournisseur, son client, juriste, etc.…
Mise à part être dans une relation affective avec une personne, mieux vaut éviter, si on veut rester professionnel, d’utiliser le « tu ».
Ainsi de nombreux couples mariés et travaillant dans une même entreprise, se tutoient à la maison, mais vont se vouvoyer en entreprise : ils sont en mode « travail » et non plus en mode affectif.

film muet_noir et blanc_parole Via Silent films still archives

Le cas de la culture d’entreprise
Lorsque j’ai moi-même débuté mon année d’alternance à la direction de la communication de la SNCF, l’une des premières phrases de ma N+1, fut « Ici, on est une grande famille, et on se tutoie », et une alternante voisine de bureau de glisser à mon oreille « Oui, et le souci, c’est que tu ne sais donc pas forcément à qui tu parles ! Car même les grands patrons vont te tutoyer ! ».
À vous de cerner ce qui domine dans votre entreprise, le « tu » ou le « vous ». Elodie B., enseignante en école primaire : « J’ai effectué plusieurs missions. Dans certaines écoles on tutoyait les élèves et dans d’autres, très strictes, c’était vouvoiement obligatoire pour tous ! il faut savoir s’adapter ! »
Tout réside, pour bien s’adapter, dans l’observation du milieu ou vous évoluez.