Détruit par la solitude et l’alcool, Jack Kerouac est mort en 1969, à l’âge de quarante-sept ans. Le 23 mai, dans les pas du chef de file de la Beat Generation, calons-nous dans les fauteuils rouges et « enfonçons-nous dans la nuit occidentale à la suite de ces mauvais garçons au cœur pur ».


Engagement à la fois artistique et philosophique, la Beat Generation est un courant qui a marqué les esprits – les plus tordus comme les plus intellects – et qui inspire et fascine encore aujourd’hui. On the road, le célèbre livre de Jack Kerouac, sort le 23 mai dans les salles de cinéma françaises. Kerouac y raconte de façon quasi autobiographique ses aventures – celles de Sal Paradise, aux côtés de son compagnon de route, Neal Cassady – Dean Moriarty dans le roman : du campus universitaire bien pensant au bord du fossé. Jet d’encre et de prose spontanée, le roman éclate les normes et les codes d’une Amérique conservatrice et puritaine en plein maccartysme. Kerouac ne mâche pas ses mots et clame haut et fort ses idées : contre l’hypocrisie, contre le conformisme, pour « faire éclater le feu du pétard ». Départ avec quelques dollars au fond des poches pour un voyage initiatique dont personne ne sort indemne.

Apporter sa modeste contribution, perpétuer la lignée au travers des générations : les éditeurs et les cinéastes reprennent le flambeau pour que jamais ne s’épuise le courant beat. Tout a commencé une soirée illuminée de 1948, aux États Unis, quand Jack Kerouac, entouré d’Allen Ginsberg, de Neal Cassady et de William Burroughs, donne le mot : « Beat Generation » ; une nouvelle vision de l’art, saccadée, révoltée, angoissée, à base de drogues, d’alcool, de filles et de beat. Le terme beat, dans le langage de la rue, signifie « battu », « laminé », « foutu ».  Kerouac l’emploie en faisant référence au rythme du jazz, sa pulsation, lui qui vénère les improvisations qui coupent le souffle. I’m beaten down.

Le Beat Generation, c’est une attitude artistique ambivalente face au réel, entre béatitude et abattement. L’expression a été universellement acceptée par les critiques pour décrire ce mouvement de rébellion représenté par un petit groupe de poètes et romanciers authentiques et doués, mais aussi par un nombre bien plus grand de jeunes gens oisifs. Être beat, c’est s’abandonner et dénoncer l’inutilité de la société moderne. Aujourd’hui, les fils de la Beat Generation – au sens propre comme au sens figuré –  sont toujours (hyper)actifs.  À six ou sept décennies de distance, William Burroughs Jr, Dan Fante – le fils du célèbre John…  Barry Gifford ou encore Bukowski… Moins intellos, plus pornos, ennemis enragés des tabous en tous genres, ils revendiquent leur héritage et vénèrent la sainte trinité : Jack Kerouac, William Burrough, Allen Ginsberg. Le mythe continue.

La légende dit que Kerouac s’est essayé à l’adaptation de son livre de son vivant, avec Marlon Brando et James Dean en têtes d’affiche. À part quelques lettres envoyées aux acteurs, aucune trace de ce projet. Mais le roman culte fascine les cinéastes. En 1969, Francis Ford Coppola récupère les droits d’adaptation. Walter Salles s’y colle soixante ans plus tard. On attendait que ça : « des filles, des visions, tout quoi : la perle rare ». Sous haute tension, parés pour les uppercuts : la consécration du génie de la Beat Generation, de son œuvre phare, par le 7e Art.

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