Le paysage éditorial Slovaque. Xavier Galmiche, 25 janvier 2018

 

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Les documents distribués durant la Masterclass et le dépliant réalisé par l’équipe de relations publiques.

En mai 2018, la promotion des Master 2 Ingénierie éditoriale et communication partira en voyage d’études ! Deux destinations : Vienne et Bratislava… à moins que ce ne soit Vienne et Presbuürg ? Vienne et Presparok ? Ou bien Pozsony ? Si l’on n’a pas conscience de la forte diglossie slave, on a vite fait de se perdre en suivant les panneaux de signalisation !

Lors de son intervention, le 25 janvier 2018, Xavier Galmiche a transmis aux étudiants sa passion et son savoir sur la culture slovaque et ses influences, afin de les aider à se préparer au mieux au futur voyage.

 

La Slovaquie : une histoire multiculturelle

Xavier Galmiche dirige l’UMR (Unité Mixte de Recherche) Eur ORBEM, consacrée aux cultures et sociétés d’Europe orientale, balkanique et médiane : en bref, les pays d’Europe centrale. C’est donc tout naturellement qu’il nous a proposé une présentation historique de la Slovaquie.

Entrée dans l’Union européenne en 2005, comme d’autres pays d’Europe centrale et balkanique, la Slovaquie est l’un des plus jeunes pays d’Europe, puisqu’elle est née de la scission de la Tchécoslovaquie en 1993. Auparavant, elle a été l’objet de diverses colonisations, divisions et fusions ; ainsi, les 1 000 ans d’histoire de la Slovaquie peuvent se lire à travers la diversité et l’évolution des peuples habitants dans le pays : Slaves, Hongrois, Allemands, Juifs, Ruthènes… La multiculturalité est très forte.

Et pour cause ! C’est au vie siècle que débute le peuplement slave en Europe – suite à des guerres. Dans le même temps émerge la Grande-Moravie : elle évangélise les peuples et apporte l’alphabet cyrillique – et par là, la première littérature slave. Puis, au xe siècle, la région passe sous domination magyare : elle fait alors partie de la Hongrie, qui sera englobée dans l’empire Ottoman au xvie siècle – ce qui provoquera beaucoup de migrations dans les deux sens. Après la Première Guerre mondiale, l’Autriche-Hongrie – créée au xixe siècle – est démembrée et, avec les accords de Munich de 1938, la Tchéquie est devenue un protectorat de la Slovaquie – elle-même devenue un État. Mais très vite, après la Seconde Guerre mondiale, la Tchécoslovaquie est reconstituée : la mémoire de la Slovaquie indépendante est alors effacée, et les populations se redéploient.

Aujourd’hui, après des années de mixité et d’évolution des frontières et des peuples dominants, on ne peut pas parler de la culture slovaque, mais bien des cultures slovaques.  X-Galmiche_illu2

Xavier Galmiche, prêt à commencer la Masterclass

 

Une mosaïque littéraire et linguistique

Marquée par une histoire complexe, la Slovaquie est dotée d’une richesse linguistique sans pareil : slovaque, slave, tchèque, hongrois, latin coexistent auprès du polonais ou encore du sorabe, parlé par une minorité d’origine allemande. Cette mosaïque ethnique et culturelle qui fonde la richesse du pays cache cependant une hiérarchie particulièrement sensible en littérature. Ce phénomène, que l’on peut qualifier de « diglossie », a conduit à la production d’œuvres très différentes et hiérarchisées selon leur langue d’écriture.

Jusqu’au xixe siècle, la langue slovaque est la langue des paysans et s’oppose aux grands textes rédigés en latin. Le hongrois devient également la langue noble, dans laquelle les principaux auteurs écriront leurs œuvres. Par exemple, Kálmán Mikszáth écrira ainsi Le Parapluie de Saint-Pierre qui évoque en langue hongroise les péripéties d’un curé qui vient d’hériter d’une petite sœur.

Quelques auteurs s’efforceront cependant de stabiliser la langue slovaque et plusieurs écoles s’opposeront comme celles Jan Holly, un écrivain romantique du xixe siècle, et d’Anton Bernolák. In fine, la norme qui s’imposera est celle de Ľudovít Štúr qui désignera un dialecte montagnard du centre de la Slovaquie comme dialecte de référence de la langue slovaque.

Au xxe siècle, Dominik Tatarka, figure imminente de la dissidence slovaque, publiera durant près de trente ans des ouvrages empreints de surréalisme. L’un de ses romans les plus célèbres, Le Démon du consentement (1956), publié en pleine période de déstalinisation, raconte l’histoire d’un écrivain du régime communiste. Le récit prend la forme d’une course-poursuite assez drôle, qui n’est pas sans rappeler du genre du thriller.

 

La revue Cultures d’Europe Centrale

En 2001, l’Institut d’études slaves de l’Université Paris-Sorbonne ouvre un nouveau centre de recherches dédié à la région centre-européenne : le CIRCE. C’est au sein de ce dernier que, la même année, les enseignants-chercheurs fondent la revue Cultures d’Europe Centrale. Née de l’insatisfaction de ne pas trouver, dans le paysage éditorial français, d’espace de parole dédié aux cultures de l’Europe centrale, la revue est la première en France à se consacrer aux thématiques liées à cette région aux multiples visages.

Les contenus proposés par Cultures d’Europe Centrale sont très variés et transdisciplinaires : on y trouve aussi bien des actes de colloques que des traductions de textes littéraires. Chaque numéro de la revue fait écho aux problématiques soulevées par le CIRCE à travers un riche panel de textes.

Cultures d’Europe Centrale compte aujourd’hui près de vingt numéros. Les enseignants-chercheurs de l’Institut d’études slaves, parmi lesquels Xavier Galmiche, se consacrent régulièrement à la création de numéros hors-série afin de se concentrer sur des régions et problématiques précises telles que la Carinthie (H.S. no 2), la Pologne (H.S. no 8), ou bien… La Slovaquie, avec le hors-série n7 : Miroirs brisés : récits régionaux et imaginaires croisés sur le territoire slovaque.

Ce numéro porte sur la construction de l’identité slovaque tout au long du xxe siècle, malgré des disparités réelles au sein du territoire. L’influence politico-culturelle des régions voisines et notamment l’Autriche, la Hongrie et, bien sûr, la République Tchèque sont également interrogées afin d’appréhender au mieux la richesse et la diversité de la culture slovaque. Richesse dont Pavel Vilikovský, auteur de « Ma Bratislava à moi », témoigne si bien. X-Galmiche_illu3

Le hors-série numéro 7 (2011) de la revue Cultures d’Europe Centrale éditée par l’Institut d’études slaves,

intitulé Mroirs brisés : récits régionaux et imaginaires croisés sur le territoire slovaque.

 

 

À emporter dans votre valise lors du séjour d’études

Petite sélection littéraire pour en apprendre plus sur la Slovaquie :

  • Étienne Boisserie, Clara Royers (dir.), Miroirs brisés : récits régionaux et imaginaires croisés sur le territoire slovaque, Paris, Institut d’études slaves, Cultures d’Europe Centrale, hors-série no 7, 2011.
  • L̐ubomír Lipták, Petite histoire de la Slovaquie,Paris, Institut d’études slaves, coll. « Cultures & sociétés de l’Est », 1996.
  • Kálmán Mikszáth, Le Parapluie de Saint-Pierre, Paris, Vivianne Hamy, 2007.
  • Catherine Servant, Étienne Boisserie (dir.), La Slovaquie face à ses héritages : horizons, critiques de la culture slovaque contemporaine, Paris, L’Harmattan, 2004.
  • Dominik Tatarka, Le Démon du consentement, Soignies (Belgique), Talus d’approche, 1986.

 

 

Équipe Masterclass :

  • Relations publiques et presse : Orane Mousset, Aurore Pelliet et Emmanuelle Phé.
  • Communication évènementielle : Cassiopée Bourgine, Lorrine Brion et Émilie Pierre-Jean.