La réponse de l’édition aux sirènes des « sixties »

La réponse de l’édition aux sirènes des « sixties »

Face au grand retour de l’esthétique « sixties » américaine, les éditeurs français ne sont pas à la traîne. Moins visible et certes plus discrète que les œuvres visuelles, la littérature disponible en France à l’heure actuelle présente de sublimes exemples de dissection des mœurs et lois sociales d’une époque pas si lointaine. Si les années soixante aux États-Unis sont fantasmées comme l’ère de la prospérité, de la modernité et des révolutions sociales, le vernis écaillé de cette image révèle souvent une réalité bien plus morne. Car le tournant des années cinquante-soixante c’est aussi, derrière l’image harmonieuse de la « middle class » des « suburbs » américains, les coulisses sombres du désespoir de la ménagère. Écartelée entre un désir d’émancipation et l’obligation d’afficher l’image d’un parfait bonheur et confort domestique, la femme des « sixties » erre parmi ses espoirs déçus. L’homme, lui, se sent souvent dépossédé de sa virilité face à des femmes de plus en plus indépendantes. Tous sont en quête d’un impossible ailleurs, loin de la norme et des convenances étriquées. Mais parfaitement aliénés par l’air du temps, ils déambulent, et se perdent dans un quotidien sournois. Les observateurs les plus fins de ces déboires restent les auteurs américains. Contemporains de cette époque, certains sont les témoins privilégiés de cette apparente harmonie. Et plus que jamais, leurs œuvres bénéficient aujourd’hui d’une attention particulière de la part des éditeurs français. La quasi-totalité de la production littéraire de trois d’entre eux a été (ré)éditée en France entre 2000 et 2010. John Cheever et Richard Yates, tout deux nés dans le premier quart du vingtième siècle, sont les deux plus importants portraitistes de cette Amérique...