Les Editions du Masque ont relooké leur célèbre collection du Masque Jaune en octobre dernier. Analyse d’un lancement éditorial passé inaperçu alors qu’ils s’apprêtent à publier la deuxième vague de publications le 13 février prochain

Retour sur le passé …

Fondé en 1927 par Albert Pigasse, Le Masque est toujours aujourd’hui l’éditeur phare du polar. Grâce à la publication des textes de la grande Agatha Christie, le Masque crée sa célèbre collection poche du Masque Jaune. Essentiellement composée de grands classiques du polar, le Masque Jaune proposait uniquement des textes d’enquête sur le schéma typique du roman à énigmes : un meurtre, un détective, des indices, une réflexion logique et une élucidation argumentée.
Aujourd’hui, en dehors de quelques prix attribués chaque année (Prix du Roman d’Aventure, Masque de l’Année et Prix de Beaune), et les romans d’Agatha Christie toujours sur la liste des prescriptions scolaires, le Masque Jaune fait partie du passé et des livres « poussiéreux ». Pour reconquérir une place en librairie sur les tables de nouveautés, la ligne éditoriale de la maison a opéré un tour à 180° en octobre dernier en lançant la collection Masque Poche qui a remplacé le Jaune.

Vers un avenir plus moderne …

Outre cet élan de modernisation, la nouvelle éditrice du Masque, Alice Moneger, nous déclare dans une interview que « cette refonte du Masque Jaune a aussi pour but de donner une cohérence à la production globale du Masque, notamment avec les Grands Formats ». Plus qu’une refonte, Le Masque Jaune change de visage et tente l’unité́ avec les différentes collections de la maison en les intégrant totalement au Masque Poche suivant une déclinaison interne thématique avec une couleur correspondant à un domaine de lecture : les jaunes qui reprennent les pépites du fonds, les noirs pour les romans contemporains (thriller, romans noirs), et les gris pour les romans policiers historiques. C’est donc par cette déclinaison thématique que le Masque Poche va s’ouvrir à tous les genres du polar et essayer de figer son image pour les 85 prochaines années à venir.

couv Masque Poche

Une charte graphique qui fait du neuf avec du vieux !

Tout en gardant son côté́ rétro avec le mythique logo du masque et de la plume (sa marque), l’identité́ graphique de la collection surfe sur la tendance du vintage en ajoutant une griffe plus design. Alice Moneger souhaitait réinventer la collection pour montrer au public que « la maison a une réelle volonté́ de vivre avec son temps ». Son objectif premier a donc été de choisir une maquette délibérément moderne en jouant sur la typographie, le noir, le mat (très à la mode chez la concurrence comme Babel Noir) et en revenant à l’illustré. Outre le travail sur les visuels de couverture, l’éditrice souhaitait soigner la maquette intérieure pour rendre sa collection plus qualitative, notamment en intégrant les trois Prix en fin d’ouvrage ainsi que les nouveautés les plus récentes.
Pour assurer une reconnaissance immédiate et une meilleure visibilité́ en librairie, Le Masque envisage une place omniprésente sur les tables des libraires : avec trois séries de parutions de six titres par an (octobre 2012, février 2013, mai 2013) Alice affirme bien cette volonté de passer à un rythme supérieur de publication.

Objectif : fidélisation et visibilité à chaque coin de rue !

« Redevenir une collection de référence grand public à un prix abordable ». Alice Moneger s’exprime sur la nouvelle stratégie de communication du Masque Poche. A noter ici que la stratégie marketing du nouveau Masque Poche a baissé ses prix à 5-7€ maximum (au lieu de 7-9€) par titre pour élargir la cible polar de cette collection et attirer les lecteurs poche.
De gros moyens commerciaux devaient être mis en place pour assurer la plus large diffusion possible et redonner accès au Masque Jaune aux multiples points de vente : librairies de premier niveau, enseignes (Fnac, Virgin, Cultura), hypermarchés et Relay. Malheureusement, LE véritable lancement de collection n’a pas eu lieu, ou du moins il s’est résumé à :une page de pub dans ALIBI (magazine spécialisé) et en librairie des PLV (Publicité́ sur Lieu de Vente), et des dépliants gratuits en libre-service.
Le budget marketing qui devait être spécialement attribué au Masque Poche pour orchestrer un lancement en grand devait comprendre : une page de pub dans Livres Hebdo, un affichage dans les gares sur une campagne d’une semaine en début de parution des premiers titres, la refonte du site Internet des Editions du Masque avec l’intégration d’une rubrique Masque Poche, … etc.
Le mythique Masque envois la grosse cavalerie pour quitter son image de polar classique et s’orienter vers un visage plus moderne. Coup d’épée dans l’eau ou twist magistral de la part de cette nouvelle éditrice ? Comme le dit si bien Philippe Lemaire (Le Parisien), « Sous l’effet de rachats successifs, cet éclectisme assumé a fini par virer au grand bazar. Il était temps d’y apporter un peu de cohérence et d’air frais… » (article du 8/02). Mais sans ce réel lancement marketing, les ventes sont encore trop faibles face aux objectifs prévus. Peut-on déjà parler d’échec, ou faut-il laisser grandir la collection d’elle-même et donner la main aux lecteurs plutôt qu’à l’éditrice ou au responsable commercial ?

Et vous, avez-vous vu ces livres sur table dans votre librairie ?

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